Écrire semble souvent attirer des pensés anxiogènes: c’est long, c’est compliqué, c’est un travail demandant moults efforts. Pour le parent éducateur, c’est souvent un sujet sensible parce qu’écrire, c’est concret, sur papier et bon, c’est une des traces d’apprentissage les plus faciles et claires: voici ce que mon enfant écrit.
Quand l’enfant associe écrire avec quelque chose de négatif, ca peut drôlement alourdir le quotidien.

Dans notre famille, j’avais envie qu’écrire soit quelque chose de le fun à partager ensemble: c’est pas mal utile pour jouer après tout, de pouvoir mettre ses idées sur papier. Je voulais que ce soit un outil, qui oui, demande un effort, mais un outil que les enfants auraient le goût de maitriser en voyant tous ces supers pouvoirs. Parce que, prenons le temps d’y penser, ne trouvez-vous pas formidable que 26 lettres permettent d’écrire tous les messages du monde, de partager des idées, de l’informations, d’apprendre, de faire rire!?!

Chez moi, écrire, c’est un privilège de grand qui est attendu. Parce que quand tu écris, tu rejoint le temps d’auteur. Parfois, plus jeune, tu sera invité et quelqu’un écrira pour toi et tu goûtera au plaisir. Mais ce n’est pas pas pareil qu’écrire par toi-même.

Alors, c’est quoi au juste, le temps d’auteur?
C’est tout simplement un mot gobe-tout pour parler des moments pendant lesquels nous écrivons. Au départ, j’ai été inspiré par une pratique appelé les ateliers d’écriture. Ce matériel est particulièrement adapté aux classes, mais il m’arrive encore d’en utiliser (comme celui sur la poésie qui est fantastique!). Ces bases fabuleuses m’ont permis d’ensuite créer une version pour notre famille, plus proche de notre réalité. Une de ces réalités, c’est que je suis toujours en multi âge et l’approche basé sur l’autonomie et le duo-tang d’auteur me permettent d’offrir de l’aide individuelle facilement pendant que les autres enfants continuent d’écrire.

Avec le temps, le meilleur moment de la journée pour cette activité a beaucoup variée: d’abord ce fut le soir pendant que les petits dorment et présentement c’est souvent le matin. L’important pour moi c’est de le faire assez souvent pour que ce soit habituel pour eux de s’asseoir et écrire, mais je ne me stresse pas avec les saisons de la vie modifiant la fréquence ou le moment choisi.

Qu’est-ce que je veux dire par autonomie et duo-tang d’auteur ?
La base du temps d’auteur, c’est généralement tout simple: des crayons ou stylos, des feuilles contenant différents formats de pages (pages pleine, encadré avec 2 phrases etc.), et le duo-tang d’écriture de chaque enfant. Tout le reste peut changer, mais cette base demeure. Le duo-tang comporte 2 pochettes : Une pour les créations qui ne sont pas terminés, et une pour celles qui doivent être corrigées. Au centre, la première page est pour y noter des idées, puis il y a les textes terminés + leur lexique personnel. Je colle à l’endos du duo-tang une feuille blanche et j’y mets des trucs personnalisés selon les défis de chaque enfant. Pour un enfant débutant l’écriture, ce pourrait être de petits dessins rapides pour se souvenir disons de la différence entre ou et on. Ce duo-tang leur donne de l’autonomie parce qu’ils peuvent ranger un texte pour en commencer un autre s’ils terminent ou n’ont plus d’idées, le mettre dans la pochette dédiée s’ils veulent de l’aider pour le corriger…

Utiliser l’approche basé sur l’autonomie est aussi pour moi une façon de moduler le temps selon chaque enfant: Les enfants écrivent, disons, 20 minutes, puis je vais aider le plus jeune et ensuite il part jouer, et je vais aider l’enfant suivant (qui aura continuer d’écrire pendant que j’étais avec le plus jeune), etc.. La durée varie selon les projets, les inspirations.

Alors, on écrit quoi ?

Le temps d’écriture peut prendre plusieurs formes, principalement les suivantes:

– Écrire librement

– Écrire avec un buffet d’idées (comme l’image ci-haut par exemple. Je les prépare moi-même ou je cherche sur mieux enseigner des situations d’écritures pour disons Halloween.)

– Écrire dans un contexte surprenant (Nous avons déjà écrit dehors par une nuit fraiche avec des lampes de poches, dans le noir, pour ressentir le froid et la noirceur, nous avons déjà écrit sur des sujets négatifs pour ensuite faire bruler nos soucis dans un feu etc. etc. )

– Écrire avec un projet précis
Parfois, l’enfant aura un objectif précis: écrire un livre, faire une carte de fête, tenir une correspondance. Le temps d’auteur est parfait pour continuer ce type de projets. Ils peuvent changer de projet librement quand ça leur dit.

– Réaliser des séquences d’ateliers d’écritures
En septembre, cette année, nous avons fait la séquence sur la poésie dans l’objectif d’aller suspendre nos poèmes lors d’un festival de la poésie de notre ville. Ce fut hyper motivant !

– Soirée de jeux d’écritures (Cadavre exquis, Dessine et Décris, les ordres, les devinettes etc…) Il y a tellement de jeux amusants possibles selon nos objectifs ! Ce sera l’objet d’un prochain article. 😉

Comment est-ce qu’on commence?
Au tout-début, c’est davantage de l’écriture approchée. L’enfant va faire un dessin, tenter d’y ajouter des mots descriptifs (des étiquettes) en utilisant ses connaissances sur les sons des lettres. Nous allons ensuite, ensemble, sur un tableau blanc, reprendre quelques mots et les décortiquer son par son.
Puis, éventuellement, il y aura une phrase, puis deux, puis trois et les suites de lettres vont se transformer en mots lisibles, d’abord phonétiquement (les sons fonctionneront même si les lettre choisies ne sont pas les bonnes) et éventuellement selon la norme d’orthographe. Si les sons sont tous la, réjouissez-vous c’est un grand pas déjà vers l’écriture ! Comme pour le jeu libre, j’essaie de faciliter toujours l’étape suivante, en proposant par exemple une feuille contenant juste un peu plus de lignes.

Et la grammaire ?

Oh, et avec écrire, vient éventuellement corriger, vous savez tous ces trucs de grammaires, c’est aussi leur moment de gloire pendant le temps d’auteur. Je commence à corriger quand l’enfant me le demande parce que je veux qu’on le fasse parce que c’est important pour lui, c’est comme ça qu’il sera motivé. Au fil du temps, ça devient une partie du rituel et je m’affiche disponible pour corriger vers la fin de chaque temps d’auteur. Je corrige uniquement ce qu’on me demande de corriger, parfois ça ne sera pas ce sur quoi l’enfant travaillait aujourd’hui.

Avec cette approche, la grammaire n’est pas présenté de façon abstraite mais de façon vivante. En fait, pour tout dire, j’utilise pour la grammaire la même approche que tout le reste en tant que convaincue des bienfaits du jeu libre: J’observe mon enfant jouer avec les mots, pour savoir repérer lorsqu’il a besoin de quelque chose, alors je lui offre. Souvent, les concepts de grammaires seront présentés d’abord sous forme de jeux (un avis de recherche au mûr demandant de retrouver des déterminants, par exemple!) ou pointer dans un livre pour relever un exemple intéressant.

Et ensuite, j’utilise ces connaissances lors de la correction en tentant de bâtir un répertoire de connaissances entre l’enfant et les mots: Ce mot est un verbe, qu’est-ce que ça peut nous donner comme indice sur la façon dont le son é s’écrit à la fin? Ce mot est un nom, ok alors allons voir son déterminant. Hmm, il est au pluriel, qu’est-ce que ça signifie pour le nom qui le suit?

Souvent, je vais gribouiller des outils temporaires, des aides mémoires avec l’enfant, partant de ce qu’il aime au moment où la règle arrive. Tellement plus significatif!

Quelques jours plus tard, quand le concept semble clair, je vais proposer de transformer l’apprentissage en page de lapbook dans le cadre de leur cahier de grammaire interactif que nous fabriquons ensemble. Ça permettra de raviver la mémoire aussi.

Et ainsi de suite.

Et ensemble au fil du temps, nous bâtissons son répertoire d’outils. Pour moi, écrire peut devenir un jeu libre, de la même façon qu’un jour l’enfant gagne en motricité fine et les legos deviennent un jeu de construction plutôt que simplement du matériel pour remplir un bac et le renverser.




Ressources:
Blog sur les ateliers d’écritures

Cahiers de français interactifs